Okinawa 1945, d’Ivan Cadeau

J’ai déjà parlé ici plusieurs fois des ouvrages de la collection Champs de bataille des éditions Perrin (Gettysburg, Verdun et Kharkov). Vu ma satisfaction avec les ouvrages précédents, je continue bien évidemment à l’explorer. Or l’un de ces volumes est de la plume d’Ivan Cadeau, dont j’avais déjà fort apprécié le livre consacré à la guerre de Corée. Il a donc finit par arriver en haut de ma pile à lire.

La bataille d’Okinawa est la dernière grande bataille de la guerre du Pacifique, le Japon souffrant encore une défaite après celle-là mais sur terre en Mandchourie face à l’Armée Rouge. Une bataille sur un île de mille deux cents kilomètres carré où plusieurs centaines de milliers de soldats s’affrontent pendant près de trois mois, dont une partie sous une pluie infernale qui transforme le terrain en cauchemar de boue.

Comme pour les autres ouvrages de cette collection, Cadeau resitue la bataille dans le conflit qui la concerne. En commençant avec le déclenchement des hostilités par le Japon en décembre 1941, on suit rapidement le déroulement de la guerre dans le Pacifique, jusqu’au dernière étape de la reconquête américaine. Et l’on voit qu’Okinawa fait partie de ces batailles qui auraient pu ne jamais avoir lieu. Les différentes options disponibles aux dirigeants américains n’imposaient pas forcément de passer par là (c’est également vrai pour l’autre bataille de début 1945, celle d’Iwo-Jima). En tout cas, l’auteur nous explique bien comment ce choix se fait et les préparatifs des deux parties, les japonais s’attendant clairement à voir les américains passer par là.

Les différentes phases de la bataille sont bien expliquées. Tout comme les éléments annexes : prises de diverses îles aux alentours, raid du Yamato, etc. Cadeau détaille assez bien les opérations sans pour autant se perdre dans des détails. On a notamment un bon éclairage sur le commandement des deux côtés et les prises de décision sur des moments clés. Et les cartes en couleur disponibles au milieu de l’ouvrage aident à s’y retrouver. Ceci est l’une des marques de fabrique fort bienvenue de cette collection.

Fidèle à la volonté de la collection de ne pas oublier la vision par le bas, l’ouvrage est parsemé d’extrait de témoignage des combattants. Ceci est vraiment utile pour bien saisir l’enfer que cette bataille a pu représenter pour celleux qui l’ont vécu. Parmi les témoins, on retrouve notamment Eugene B. Sledge qui fut auteur d’un récit qui fut l’une des bases de la mini-série télé The Pacific, une série dont il est l’un des personnages principaux. Et à la lecture de l’ouvrage de Cadeau, je trouve que la série a plutôt bien retranscrit l’ambiance de cette bataille.

Les civils ne sont pas oubliés. Car cette bataille est la principale bataille de la guerre du Pacifique dans laquelle les civils sont présents de face quasi-permanente. L’auteur précise bien aussi toute la particularité de la population d’Okinawa. Les îles Ryūkyū ayant été annexées par le Japon dans le courant du dix-neuvième siècle, la majorité de la population civile de l’île n’était pas japonaise. Ce qui n’a pas empêché les troupes de l’empire du soleil levant de leur imposer un esprit « japonais », allant jusqu’à les pousser au suicide ou les éliminer si les civils tentaient de se réfugier en terrain sous contrôle américain. Aujourd’hui encore, il existe un contentieux entre les habitants des Ryūkyū et le reste du Japon.

La partie mémorielle est aussi couverte et elle est particulièrement importante. Non seulement du fait du contentieux évoqué ci-dessus, mais aussi à cause de la façon dont le Japon gère son rapport à son passé, avec une forte teinte de négationnisme des crimes de guerre. L’auteur couvre aussi le sujet des attaques suicides, improprement appelées kamikaze, dont cette bataille fut clairement l’épicentre. Avec un coût non négligeable pour la marine américaine.

J’ai beaucoup apprécié cet ouvrage qui présente très bien son sujet, avec son avant, son pendant et son après. On a toujours la vue par le bas avec des extraits de témoignage. Des sujets comme les attaques suicides et le traitement de la population locale ne sont pas oubliés. Et la forme est toujours aussi appréciable : livre en format moyen avec rabats, cahier de cartes couleurs au milieu et marque-page faisant office de légende pour les cartes et de chronologie. C’est impeccable et vivement recommandable pour celleux qui s’intéressent à cette bataille.

Okinawa 1945
d’Ivan Cadeau
éditions Perrin / Ministère des armées
283 pages, dont cartes, annexes, notes, bibliographie et index (format moyen)

disponible en numérique chez 7switch

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