ATG #73 : L’aventure de Procidis

La fiche de l’émission

N’ayant pas fait de chronique dans l’émission depuis quelques temps, j’ai décidé de faire un peu le tour de certaines lecteurs de ces derniers mois qui m’ont plu.

– Commençons avec le deuxième volume d’une trilogie : La clé du menteur, de Mark Lawrence. Cette trilogie a pour cadre le même univers que « fausse » fantasy (mais de vrai post-apo) qu’a utilisé Lawrence dans sa précédente trilogie, dite de L’empire brisé. Le second volume de cette série, intitulée La reine rouge, poursuit dans la même voie que le premier, avec un narrateur au ton différent de celui de l’Empire brisé. Jalan est toujours aussi imbu de lui-même et n’hésite pas à réécrire les événements qu’il raconte pour améliorer son rôle. Je continue d’apprécier l’exploration de cet univers particulier, notamment la façon dont ce monde de « fantasy » regarde les ruines technologies de la civilisation qui les a précédé. Qualitativement, je suis content de voir que Lawrence arrive à maintenir le niveau livre après livre, quand il ne l’augmente pas.

– Autre suite de série, cette fois le troisième volume d’une tétralogie : Club Uranium, de Stéphane Przybylski. A plusieurs reprises, j’ai dit du bien de la tétralogie Origines et je peux maintenir mon appréciation. L’intrigue de ce croisement entre Indiana Jones et Roswell progresse. Pendant que les armées s’affrontent sur les champs de bataille, c’est la course en coulisse entre les différents services secrets. Et les lignes de partage ne suivent pas forcément les frontières géopolitiques. L’auteur propose toujours quelques visions de l’après-guerre. Si je comptais bien lire la suite, la dernière page de ce troisième volume n’a fait qu’accroitre cette envie.

– J’ai déjà parlé de Laurent Kloetzer avec l’un des livres qu’il a co-écrit avec sa femme : Anamnèse de Lady Star. L’auteur est de retour, en solo cette fois, avec Vostok. Si l’on se trouve dans le même avenir que son précédent roman, cela n’a pas vraiment d’impact sur le récit. On y suit Leonora, jeune chilienne dont le frère traine avec une bande mafieuse. Les magouilles de ce dernier vont les entrainer jusqu’à Vostok, ancienne base antarctique soviétique et lieu le plus froid du monde. Kloetzer sait toujours proposer un récit avec un abord fantastique. Ici j’ai aussi beaucoup apprécié de retrouver le plaisir que j’avais eu à lire les thrillers polaires d’Alistair McLean ou bien Terreur de Dan Simmons. On sent bien le froid et la désolation de ce lieu reculé et désert, où même la vie animale est absente.

– J’ai aussi eu l’occasion de me pencher enfin sur un livre qui m’avait été vivement conseille : Le chevalier rouge, de Miles Cameron. Ce premier volume d’une série de fantasy avec un côté historique m’a bien plu. On y retrouve une sorte de Bretagne rêvée, dans un monde différent du notre avec cependant des éléments qui y ressemblent. On trouve par exemple un mur quelque part dans le nord qui protège le royaume des hordes barbares qui vivent au-delà. Dans ce livre, on suit le capitaine d’une bande de mercenaire qui doit défendre un couvent. Il va évidemment découvrir que les choses sont bien plus compliqués qu’il n’y semble au premier abord. Ce roman, qui se lit très bien malgré son épaisseur, m’a un peu évoqué Cendres de Mary Gentle. Je compte bien en lire la suite prochainement.

– L’année dernière a vu l’arrivé dans le paysage éditorial de l’imaginaire francophone d’une collection de novellas, baptisée Une Heure-Lumière, aux éditions du Bélial. J’en ai lu un des volumes : L’homme qui mit fin à l’histoire, de Ken Liu. L’auteur propose un récit dans lequel une nouvelle technologie permet de faire assister à quelqu’un à une scène du passé, avec pour limite qu’un même moment ne peut être « revécu » qu’une seule fois. L’idée des concepteurs est de pouvoir permettre d’offrir des témoignages incontestables des événements historiques et ils portent leur première expérience sur un sujet polémique entre la Chine et le Japon : l’unité 731. Avec cette novella, Liu montre que le problème reste entier et que la difficulté de l’acceptation d’une réalité historique ne se limite pas à la présence ou non de preuves incontestables. Le texte peut être un peu difficile à lire par moment, du fait de la description de certaines traitements infligés aux victimes de l’unité 731, traitements dont la cruauté ne doit rien à l’imagination de l’auteur. Cette novella est une très belle peinture de la difficulté qu’il y a à regarder le passé et à savoir l’accepter.

– J’ai aussi eu l’occasion de lire quelques comics intéressants ces derniers temps. Commençons par Astro City, une série créée par Kurt Busiek, Bren Anderson et Alex Ross. Créée chez Image, passée chez Wildstorm avant d’atterrir chez DC sous son label Vertigo, cette série propose une approche un peu particulière des super-héros. On y trouve des personnages qui ressemblent assez étrangement à quelques figures célèbres du genre : Un surhomme capable de voler et qui au quotidien se fait passer pour un journaliste, un justicier sans pouvoir et tout de noir vêtu qui inspire la terreur chez les criminels tout en formant un jeune assistant, etc. Mais Busiek nous les présente non seulement à travers leurs exploits mais aussi à travers leur quotidien et leurs rapports avec les simples mortels. On s’intéresse aussi au regard que les gens ordinaires portent sur ce monde de super-héros. On retrouve un peu l’approche que le scénariste a utilisé dans la mini-série Marvel. Cette série se distingue aussi par le design tant des costumes des super-héros que de la ville en elle-même. En effet, Anderson et Ross propose un retour à une ère antérieure du comics et lui offre un côté un peu suranné mais qui passe très bien car l’ensemble est très cohérent. Il n’y pas d’édition française actuellement disponible, mais le catalogue Vertigo étant entre les mains d’Urban Comics et vu la qualité de cette série, je gage que l’éditeur finira bien par la proposer au public francophone.

– Autre comics que j’ai apprécié ces derniers mois : Crise d’identité, de Brad Meltzer et Rags Morales. Au contraire des autres « crises » célèbres de chez DC (Crisis on Infinite Earth, Infinite Crisis, Final Crisis), il ne s’agit pas là d’une intrigue avec menace à l’échelle de l’univers et grandes scènes de combat pour sauver le monde. L’histoire débute avec le meurtre de Sue Dibny, la femme d’Elongated Man, l’un des membres de la Justice League. Les meilleurs membres de la l’équipe vont alors se pencher sur ce mystère sans pourtant dénicher le moindre indice tant le crime sans parfait. Ce meurtre a pour effet de générer de l’inquiétude chez les héros, notamment ceux dont l’identité réelle est connue : quel danger font-ils courir à leur proche ? L’enquête pour trouver le meurtrier va aussi provoquer son lot de conséquence : à fouiller de façon approfondie on finit par retrouver les squelettes cachés dans les placards. Bref, la crise est bien réelle et ne sera pas sans conséquence dans la vocation des héros que dans leur confiance réciproque. Les conséquences de cette mini-série participent à la préparation d’Infinite Crisis. Bien écrit et joliment illustré, Crise d’identité est disponible en français chez Urban Comics.