J’ai parlé ici de la collection DC Finest à propos de Batman, avec les volumes Year One & Two et The Killing Joke and other stories. Mais l’éditeur propose déjà plus d’une trentaine de titres, consacrés à de nombreux personnages. Parmi ceux qui m’intéressent il y a Catwoman, dont j’ai déjà lu de nombreuses aventures. Commençons donc par le premier volume, intitulé Life Lines.
Le personnage de Selina Kyle / Catwoman apparait dès le premier numéro de la série Batman en 1940, soit un an après Batman lui-même et en même temps que le Joker. Et elle revient régulièrement faire des apparitions dans cet univers, tout en étant aussi régulièrement mise en scène dans des versions alternatives dans une bonne partie des récits centrés Batman dans des Elseworld. Mais pendant des décennies, elle n’eut pas une série qui lui soit réellement dédiée.
Les choses changent après Crisis on Infinite Earth en 1985-1986. La réinitialisation de tout l’univers DC est l’occasion de réécrire les origines de tous les personnages. Catwoman n’y échappera pas. On commencera par la revoir dans le Year One de Frank Miller et Dave Mazzucchelli en 1987.
Ce volume de DC Finest commence en 1988, avec The Tin Roof Club, un récit extrait des numéros 611 à 614 de Action Comics Weekly, en quatre épisodes de sept planches. Ce découpage de l’histoire fait qu’on mange du cliffhanger à haute fréquence. L’intrigue n’est pas fantastique mais on y trouve plusieurs éléments intéressants. Selina mène pleinement une double vie. On retrouve Holly Robinson, introduite dans Year One et qui trouve un destin funeste. Une mort qui sera plus tard annulée par l’event Zero Hour (un classique des comics de super-héros) et Holly vivra de nombreuses autres aventures dans les décennies suivantes, y compris en endossant l’identité de Catwoman. Enfin, on voit dans ce récit que Selina entretient une relation avec un flic qui connait sa double identité et semble avoir un rapport à la loi légèrement fluctuant. Un genre de situation qu’on retrouvera plus tard.
On passe ensuite à la première série intitulée Catwoman – celle en cours de publication est la cinquième. Quatre numéros seulement, les séries suivantes en compteront jusqu’à plus de quatre-vingt-dix, publiés en 1989. Cette fois, on revient plus près de Year One et on assiste vraiment aux nouvelles origines du personnage puisqu’au début de l’intrigue Selina Kyle n’est pas encore Catwoman, mais une prostituée qui vient d’être sévèrement battue. Notons une fois encore que cette origin story sera elle aussi effacée quelques années plus tard par Zero Hour.
Le récit se passant en parallèle de Year One on en revoit quelques scènes avec un point de vue différent. La construction du personnage de Catwoman est assez bien. En près de quatre-vingt-dix planches on voit comment Selina Kyle se crée une nouvelle identité, comment elle se forme aux arts martiaux (l’occasion de croiser Ted Grant / Wildcat, autre vieux personnages de l’univers DC). On voit la relation compliquée avec Sister Magdalene, qui en plus d’être une nonne est aussi la sœur de Selina. Une sœur que l’on reverra aussi à quelques occasion plus tard dans les aventures de la voleuse.
J’ai pas mal apprécié ce récit. Ça arrive à vivre dans l’ombre de Year One, en étant à peu près cohérent avec le personnage et en annonçant aussi la relation houleuse entre Batman et Catwoman.
On a ensuite le one-shot Catwoman Defiant de 1992, d’une bonne quarantaine de planches. La voleuse y devient l’objet de l’obsession de Mister Handsome, un collectionneur frappadingue qui détruit les œuvres qu’il considère comme représentative de la beauté. Selina croise la route de Batman qui enquête sur le gang dirigé par Mister Handsome. On y croise un puits de mine, un monstre et une histoire de couple sordide. Je ne suis pas très fan du style graphique de cette histoire mais j’ai assez apprécié l’intrigue.
On avance en 1993 avec Sorrow Street, histoire publiée en quatre parties dans la série Showcase ’93. Si elle occupe toujours régulièrement ses soirées en allant se servir dans les musées ou les collections privées, Catwoman / Selina se préoccupe aussi de son voisinage. Surtout lorsqu’un nouveau mafieux commence à venir terroriser commerçant et habitant. On voit là une facette du personnage qui va se développer pendant les décennies suivantes et la placer vraiment dans une position régulièrement ambivalente avec la Batfamille : elle viole la loi en volant mais elle protège nombre d’innocents. On croise un peu Robin, version Tim Drake, et le commissaire Gordon, ce qui ajoute au plaisir de lire cette histoire.
La même année commence la deuxième série Catwoman, appelée à durer plus de quatre-vingt-dix numéros. Ce volume en contient les numéros 1 à 12 ainsi que le premier annual.
Ça commence par Life Lines, qui donne son nom à ce volume, un récit en quatre épisodes. Et ça démarre évidemment par un vol. Le récit se passe en parallèle de Knightfall, grand arc de Batman où ce dernier est vaincu et estropié par Bane. C’est donc pour ce dernier que Catwoman travaille. Une situation qui ne lui plait pas. Bane ayant lui-même nombre d’ennemis, les ennuis viennent bien sûr frapper à la porte de Selina, d’une façon particulièrement fracassante. Cet arc nous fait voyager un peu puisqu’on part faire un tour au Santa Prisca, le pays dont Bane est originaire. Bref, il se passe pas mal de choses, manipulation, complot, etc. L’un des points intéressants est de voir qu’on est à une époque où très peu de gens savent qui se cache derrière l’identité de Catwoman. Ce sera loin d’être le cas à certaines autres périodes postérieures.
On a ensuite un petit épisode isolé, où Catwoman intervient pour venger une nonne agressée par un gang qui s’attaque aux paroissiens de l’église du coin. On ne s’attaque pas impunément aux gens qui nourrissent les chats. C’est assez simple et distrayant.
Les deux numéros suivants sont reliés à l’event Knightquest de l’univers Batman, suite du Knightfall. Jean-Paul Valley a endossé l’habit de l’homme chauve-souris et sa façon de gérer les choses n’est pas forcément très compatible avec celle de Catwoman. Selina intervient sous une fausse identité auprès d’un groupe de militants écolos qui veulent protester contre une pollution. Le produit toxique concerné va se promener un peu partout dans Gotham. Le plus gros problème de cette intrigue est qu’elle est partagée avec la série Batman et que deux numéros de cette série s’insèrent entre les deux numéros de Catwoman, mais ils ne sont pas présents dans ce recueil. On n’échappe pas non plus au militant écolo pas en phase avec le reste et qui pense que passer par la violence et le meurtre n’est pas illégitime. Ça a un côté assez naïf, comme les comics sont parfois capables de l’être lorsqu’ils essayent de traiter des sujets graves et sérieux.
On passe alors au premiers Annual de la série. Un numéro d’une cinquantaine de planches qui plonge dans un Elseworld moyenâgeux où un chevalier aux allures de Batman dirigent une troupe en guerre sainte contre un peuple dirigé par un homme chat, qui se trouve avoir une fille. On est dans une version alternative où « Catwoman » serait une Talia al Ghül. Bon, l’ensemble est assez cousu de fil blanc et ça ne restera pas dans les Elseworlds que j’apprécie le plus.
Le temps de deux numéros, Catwoman affronte une nouvelle menace, nommée Zephyr. On y trouve entre autres un gang d’ado sous mauvaise influence et sans reconnaissance, un proprio teigneux, un joyaux trop beau. La forme du récit annonce dès le début la tragédie finale. J’ai trouvé ça plaisant, notamment du fait de l’agacement qu’a provoqué chez moi, tout comme chez Selina Kyle, les agissements de certains protagonistes.
On termine avec trois numéros. Une intrigue qui débute avec un accident où l’une des victimes, un ami de Selina, se retrouve paralyser. Une puce cybernétique pourrait lui permette de récupérer l’usage de ses membres. Mais bien sûr, Catwoman n’est pas seule sur l’affaire, surtout pour un objet qui pourrait présenter un usage d’ordre militaire. Le dernier numéro est intégré à l’event KnightsEnd, conclusion du cycle entamé avec Knightfall. On croise donc de la Batfamille et des fils d’intrigues surgit un peu de nulle part. De plus, ça ne conclut pas cette intrigue, qui se poursuit dans d’autres séries. Mais on aura un semblant de conclusion à cette affaire de puce dans le numéro 13 de la série Catwoman… qui sera dans un autre volume de la collection DC Finest (pourquoi faire simple…)
Voici un volume un peu plus varié que ceux consacrés à Batman que j’ai lu, la première moitié couvrant différentes mini-séries réparties sur plusieurs années, avec différents auteurices et différents styles graphiques. Ça donne une certaine diversité à ce volume. Et je trouve que ça va du très moyen au vraiment intéressant, en passant par le anecdotique mais plaisant.
Un point que je voulais soulever, sur le plan graphique : ces comics datent d’une époque où de nombreux personnages féminins sont dotées d’un physique, notamment au niveau de la poitrine, qui sort franchement de l’ordinaire. C’est évidemment le cas de Catwoman pendant cette période et c’est particulièrement marqué à partir de la deuxième série Catwoman, dont les douze premiers numéros sont dans ce volume. Jim Balent a œuvré sur cette série pendant plus de soixante-dix numéros et ça n’est pas allé en s’arrangeant sur ce point. C’est un truc que je supporte plus ou moins dans les productions « anciennes » mais qui peut carrément me faire rejeter une œuvre plus récente (comics, jeu vidéo, etc.)
Dans l’ensemble, j’ai pris plaisir à lire ce volume. Catwoman / Selina Kyle est un personnage que j’aime beaucoup et qui peut donner matière à de belles choses. Mon côté complétiste me pousse à en lire le plus possible, tout comme avec d’autres personnages comme John Constantine. On trouve dans ce livre quelques récits que je pense vraiment intéressant, notamment la première série qui s’inscrit en parallèle de Batman – Year One. Le reste est plus de l’ordre du distrayant tout en étant fort agréable par moment. Un deuxième volume, Vengeance and Vindication, étant sorti je vais bien évidemment le lire.

Catwoman – Life Lines
écrit par Mindy Newell, Peter Milligan, Doug Moench, Jo Duffy, Christopher Priest, Chuck Dixon
dessiné par Barry Kitson, J. J. Birch, Tom Grindberg, Ed Hannigan, Jim Balent, Frederico Cueva
encré par Bruce Patterson, Michael Bair, Dick Giordano, Fred Fredericks, Alberto Pez, Ande Parks, Rick Burchett
colorisé par Adrienne Roy, Steve Oliff, Joe Orlando, Buzz Setzer
lettré par Carrie Spiegle, Agustin Mas, Ken Bruzenak, Bob Pinaha, Steve Haynie
éditions DC Comics
598 pages