La campagne du Rhin, de Daniel Feldmann & Cédric Mas

Dans mon exploration de la seconde guerre mondiale, j’ai parlé ici d’un ouvrage évoquant la course au Rhin de l’automne 1944, puis d’un autre relatant la contre-offensive allemande dans les Ardennes au début de l’hiver suivant. J’entame donc maintenant le chapitre suivant sur le front ouest-européen : la campagne du Rhin et la fin du conflit avec cet ouvrage signé Daniel Feldmann et Cédric Mas, dans sa deuxième édition.

Comme d’habitude, on revient un peu en arrière pour présenter la situation et comment on en est arrivé là. Les auteurs font l’état des forces allemandes au lendemain de la bataille des Ardennes puis de celles des alliés. Cette partie permet de montrer les différences en terme de doctrine entre les anglo-canadiens et les américains, avec quelques petits mots sur les français en passant. C’est l’occasion de rappeler les divers problèmes de personnalité au sein du commandement allié. On constate aussi que si du côté allemand on racle les fonds de tiroir pour trouver des hommes à envoyer sur le front, du côté allié la marge de manœuvre en terme de renfort commence à se faire mince, notamment pour les britanniques. Enfin, les auteurs terminent ce tour d’horizon par la situation de la guerre aérienne, où l’on voit quelques bizarreries comme le fait de continuer des bombardements sans que ça réponde à un quelconque besoin stratégique, à part « on a des bombardiers, faut bien qu’on s’en serve ».

On s’intéresse ensuite aux opérations limitées de janvier 1945. A commencer par la toute dernière offensive allemande du front Ouest, en Alsace, qui est évidemment un échec, avant que les forces alliées ne s’occupent de réduire la poche de Colmar qui les gênaient depuis des semaines. Enfin, on voit comment les forces américaines cherchent en vain la percée dans la région de l’Eifel et bataillent pendant deux semaines pour ne gagner qu’une dérisoire poignée de kilomètres.

La troisième partie s’intéresse aux opérations permettant aux alliés de terminer la conquête de la gauche du Rhin, principalement en février et tout début mars. Cette fois, il s’agit d’opérations mieux organisées, ce qui donnent l’occasion aux auteurs de parler de ces préparatifs. Et avec Veritable et Grenade, les anglo-canadiens parviennent à montrer qu’ils sont capables de monter une offensive à la fois minutieusement préparée tout en pouvant s’adapter à l’évolution de la situation. Par cascade, ces deux opérations vont permettre de débloquer le front américain et ces derniers vont finir de border le Rhin.

Arrive alors le moment que les alliés anticipent depuis des mois : le franchissement du Rhin. Si la saisie par surprise du pont de Remagen constitue un premier pas dans cette direction, c’est surtout la grande opération Plunder Varsity dans la zone anglo-canadienne qui est présentée en détail. Cette dernière opération de grand style sur le front Ouest assure au groupe d’armées de Montgomery de pouvoir se répandre dans le nord de l’Allemagne, tandis que les armées américaines franchissent à leur tour le fleuve plus au sud et assurent ainsi la formation d’une vaste poche au niveau de la Ruhr. Il ne reste plus alors que quelques semaines de combat avant la jonction avec les forces soviétiques et la reddition finale. Et pourtant, même là il se passe encore des choses intéressantes, notamment dans les relations entre alliés, toujours au bord de la dispute pour une raison ou une autre.

Voilà un ouvrage que je suis bien content d’avoir acquis. Les auteurs présentent bien chaque opération, avec l’idée conductrice (quand il y en a une), les préparatifs, l’état des forces et le résultat. Les cartes sont suffisamment nombreuses et claires pour bien suivre le déroulement de ces opérations. Ils n’hésitent pas non plus à parler des divers problèmes de commandement des deux côtés, que ce soit chez les allemands où la chaîne de commandement tend à se déliter et où le flou sur l’état des différentes unités devient de plus en plus grand, ou du côté des alliés où les querelles d’ego et les problèmes diplomatiques entre pays influent régulièrement sur les choix faits sur le terrain. Et au final, les auteurs montrent bien que cette période assez méconnue qui est souvent balayée en trois lignes dans les récits sur ce conflit est en fait pleine d’événements et loin d’une promenade de santé pour les alliés.

La campagne du Rhin
de Daniel Feldmann & Cédric Mas
éditions Economica
336 pages, plus bibliographie et annexes (grand format)

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