Dehors les chiens, les infidèles, de Maïa Mazaurette

Voilà un livre fort bienvenu. Point trop long et tenant tout seul. De plus Dehors les chiens, les infidèles de Maïa Mazaurette parvint à œuvrer dans un registre généralement peu exploité, celui de la fantasy post-apocalyptique.
Cela fait quatre-vingts années que Galaad a été défait par les forces de l’Antépape et que l’Etoile du Matin est perdue. Quatre-vingts années que la Lumière du Seigneur s’est éteinte et que le monde vit dans les ténèbres. Quatre-vingts années que la cité d’Auristelle envoie régulièrement des Quêteurs, groupes de jeunes gens dont la mission est de retrouver l’arme mythique de Galaad.
Le récit va suivre l’un de ces groupes, cinq jeunes hommes et femmes à peine sortis de l’enfance, dans leurs pérégrinations à la recherche de cette épée légendaire à propos de laquelle les indices manquent cruellement. Cinq jeunes gens qui n’ont jamais connu le bleu du ciel et pour qui les étoiles ne sont qu’un mythe et la Lune une simple plaisanterie.
La quête, qui dure déjà depuis quatre ans pour ces protagonistes, a pris un tour très personnel, chacun étant à la recherche de bien plus qu’un objet censé ramené la Lumière sur le monde. Et là on touche à l’une des grandes qualités de ce roman. Chaque personnage principal à sa vision du monde et se cherche d’une façon ou d’une autre. Chacun de ces jeunes gens a ses forces, ses faiblesse, et vit un drame personnel.
dehors les chiens pocheJe dois avouer que j’ai été fortement envoûté par cette bande d’aventuriers en mal de reconnaissance, avec une mention spéciale pour les deux personnages féminins de la bande. D’un côté Astasie, jeune inquisitrice particulièrement intégriste qui n’est pas sans rappeler le Nicholas Eymerich de Valerio Evangelisti par son côté implacable. De l’autre Spérance, inspiratrice du groupe mue par une foi innocente en la Lumière et véritable icône de Passion.
Pour une fois le terme fantasy apocalyptique colle très bien au texte. On navigue dans un monde chrétien qui semble arrivé à la fin des temps et ne sait plus à quel saint se vouer. Les références religieuses sont assez nombreuses dans le texte, lui apportant une jolie teinte agréable sans pour autant l’encombrer.
Maïa Mazaurette fait peu de concessions dans ce récit parfois assez sombre où la noirceur de l’âme humaine domine fortement et où l’on doute par moment que la Lumière ai pu exister. On aperçoit finalement assez peu ce qui se trame chez l’Antépape de l’Occidan Noir, le récit restant centré sur les Quêteurs, ce qui renforce les hésitations des protagonistes dont la foi en la réussite de leur mission est parfois bien chancelante.
On nous épargne aussi toute leçon de morale, laissant le lecture seul juge des actes des personnages, les motivations de ces derniers étant souvent assez clairement exposé. A ce titre  les personnages de Cyférien, héritier princier rejeté par son père pour cause de monstruosité, et Astasie (encore elle), qui recherche tant la lumière qu’elle semble parfois s’enfoncer dans les ténèbres, sont particulièrement ambivalents.
Bref, tout ça c’est bien, c’est beau, ça se lit facilement, ça projette des images dans l’esprit du lecteur et à la fin ça ne laisse qu’un regret : que ce soit déjà terminé. Reste maintenant à espérer que Mazaurette nous livre quelques autres petites pépites du même précieux métal. En tout cas ça me rassure sur l’avenir de l’imaginaire en France.
NB : En plus d’être douée d’une plume (ou vraisemblablement un clavier) très agréable, Maïa Mazaurette est une auteur fort sympathique qui prend le temps de faire connaissance avec ses lecteurs pour leur signer de belles dédicaces (comme en témoigne ce billet d’un psychopathe de mes amis).
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Dehors les chiens, les infidèles
de Maïa Mazaurette
illustration de Nicolas Siner
collection Icares
éditions Mnémos
304 pages (grand format broché)

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