Histoire des codes secrets, de Simon Singh

Fouiller dans les profondeurs de sa bibliothèque permet parfois d’en ressortir des ouvrages dont on a un peu oublié l’existence. C’est ainsi que je suis retombé sur Histoire des codes secrets, un ouvrage de Simon Sigh que je n’avais toujours par lu, alors qu’il doit prendre la poussière depuis deux décennies dans mes étagères.

Le titre présente assez simplement de quoi il va être question : l’auteur se propose de parler des codes secrets et de leur histoire. Comme dans la plupart des ouvrages historiques, Singh commence par le commencement… ou presque. Le premier chapitre débute à la fin du 16e siècle, avec le procès de Mary Stuart dont la preuve de la culpabilité repose sur un échange de lettres codées. L’auteur revient alors dans le passé et remonte aux premiers systèmes de codage datant de l’antiquité.

A chaque chapitre Singh s’appuie sur un ou plusieurs événements historiques pour illustrer l’évolution des codes et leur décodage. Car cette histoire est double et parallèle : tout comme la cuirasse et l’obus, le codage et le décodage font une course où l’un prend momentanément l’avantage avant que l’autre ne trouve le moyen de repasser devant. On voit ainsi certaines périodes historiques où les codes deviennent presque incassables avant qu’une percée conceptuelle ne renverse la vapeur.

L’auteur explique plutôt bien les différentes évolutions du cryptage, commençant avec les classiques chiffrements par translation, comme le chiffre de César. Il n’y a guère que sur la fin, lorsque l’on arrive à des systèmes récents comme le RSA et le PGP, que les choses deviennent un peu difficiles à présenter, car le chiffrement repose alors sur un empilement de calcul assez compliqués.

Outre le chiffre de César, on croise quelques « vedettes » un peu connues, comme le carré de Vigenère, Charles Babbage, François Champollion, le télégramme Zimmermann, le linéaire B et bien sûr la super-star Enigma. Cette dernière bénéficie évidemment d’un volume assez important de texte (près d’une centaine de pages) consacré à sa conception et à son fonctionnement, puis aux nombreux efforts entrepris pour en casser le code. Et si l’on voit évidemment Alan Turing et l’armée de casseurs de code de Bletchey Park, Singh parle d’abord abondement de Marian Rejewski et de ses collègues polonais qui avant guerre abattent un boulot de titan et font les premières percées face à Enigma. (note en passant : si vous avez vu le film The Imitation Game vous pouvez mettre à la poubelle une bonne partie de ce qu’il raconte.)

L’auteur évoque aussi à plusieurs reprises l’un des paradoxes de ce domaine d’activité : la gloire y est bien souvent tardive, voire posthume, quand elle n’est pas purement inexistante. En effet, tant le fait de mettre au point un code efficace que celui de le casser sont des exploits qui demandent généralement de rester secret pendant un bon moment pour conserver une utilité.

Enfin, Singh s’aventure un peu dans l’avenir (vu depuis 1999) en évoquant la mécanique quantique, pour casser du code par l’intermédiaire de l’ordinateur quantique et pour créer du code incassable avec la cryptographie quantique. Si ces deux domaines semblent avoir évolué un petit peu depuis la rédaction de l’ouvrage, je n’ai pas connaissance de percée vraiment majeure les concernant.

Histoire des codes secrets constitue un ouvrage que je trouve assez bien fait. L’auteur arrive à rendre le propos assez intelligible, même sur la partie finale et il utilise bien l’histoire pour illustrer l’évolution des codes et de leur déchiffrement. J’avoue avoir même souri en croisant la figure de Bonaventure Rossignol, casseur de code du Roi-Soleil, que j’avais déjà aperçu dans le monumental Baroque Cycle de Neal Stephenson. Ce cycle, ainsi que le Cryptonomicon du même auteur me sont passés plusieurs fois en tête en lisant cet ouvrage. La plume de l’auteur est agréable et il illustre régulièrement son propos avec des exemples, au besoin simplifiés, qui permettent de saisir assez aisément ce qu’il explique. Enfin, quelques éléments complémentaires et techniques sont relégués dans des annexes, pour les plus curieux. Bref, une lecture que je recommande volontiers a ceux qui veulent une première approche assez exhaustive sur le sujet ou qui souhaitent se rafraichir un peu la mémoire.

Histoire des codes secrets (The Code Book)
de Simon Singh
traduit par Catherine Coqueret
éditions Livre de poche
440 pages, plus annexes, glossaire et bibliographie (poche)

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2 réflexions sur « Histoire des codes secrets, de Simon Singh »

  1. Hey
    J’avoue avoir une petite curiosité naturelle pour le chiffrement et le déchiffrement dans le domaine informatique, ce qui m’a poussé vers cette chronique. Maintenant je vais devoir le lire ce bouquin !

    1. Pour la partie vraiment informatique, ça ne concernera que le dernier tiers, grosso modo, du bouquin vu que tout ce qui est avant est manuel (César, Vigenère, etc.) ou mécanique (Enigma et consort). 😉

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