Evil for Evil, de K. J. Parker

K. J. Parker fait partie des auteurs que j’ai décidé de lire plus assidûment ces derniers mois, à côté de gens comme Charles Stross ou Alastair Reynolds. Devices & Desires démarrait plutôt bien sa Engineer Trilogy. Voyons comment les choses évoluent dans le deuxième volume, intitulé Evil for Evil.

Civitas Eremia a été rasée, sa population massacrée. En vain. Ziani Vaatzes est toujours en vie et a trouvé refuge à la cour de Valens, duc de Vadani, en compagnie du duc Orsea et de son épouse Veatriz. Tout est à recommencer pour les armées de Mezentia et l’addition continue de monter pour le comité Necessary Evil.

Evil for Evil commence quasiment par la même phrase que Devices & Desires, mais dans un contexte différent. En quelques lignes je trouve avec plaisir la patte de K. J. Parker, avec notamment ces personnages qui ont l’impression de jouer une comédie ou bien qui se cognent joyeusement de ce que l’on essaie de leur expliquer patiemment. Elle continue de dérouler tranquillement son intrigue et je continue de m’interroger sur le plan de Vaatzes, sur ce qu’il a prévu à long terme et sur ce qu’il improvise au fur et à mesure. On a aussi confirmation qu’il n’est pas le seul à manipuler les événements. J’avais pris pas mal de plaisir à voir ce jeu de marionnettes dans le premier volume et ce deuxième épisode me plait tout autant, sinon plus du fait de la présence de plusieurs marionnettistes potentiels.

On voit aussi l’univers de cette trilogie s’enrichir légèrement, avec un peu plus de connaissance sur les peuples vivants dans le désert. J’ai aussi réalisé après coup que je n’avais pas aperçu le moindre élément de magie ou d’implication divine dans le premier volume, au contraire des deux précédentes trilogies de Parker. Evil for Evil continue dans la lignée de cette fantasy sans magie ni élément fantastique.

K. J. Parker restant fidèle à elle-même, ce volume a droit à son lot de descriptions un peu techniques, de métier ou d’art dont on perce un peu les mystères, etc. On a aussi ce côté “dans les coulisses” en voyant un peu ce qu’il se passe sur un champ de bataille une fois que les forces en présence ont évacué le terrain. On côtoie ainsi un moment les gens qui s’occupent de détrousser les cadavres, de les enterrer, qui font le tri dans le butin, évaluent l’état des blessés restants pour savoir s’ils valent littéralement le coût de les soigner pour les échanger contre récompense, etc. On voit aussi des défis assez inédits dans des ouvrages de fantasy, comme un personnage qui essaie de comprendre comment recoudre des vêtements alors qu’il n’a jamais appris à utiliser un fil et une aiguille. On continue aussi de voir, dans la lignée du premier opus de la trilogie, que la guerre est en grande partie une affaire de logistique. Si l’on n’a pas de quoi nourrir les troupes, les approvisionner en munitions et réparer l’équipement, on ne va pas bien loin.

Dans les choses que j’apprécie chez Parker, il y a sa façon de dépeindre les personnages. Dans ma précédente chronique, j’évoquais sa façon de mettre en scène le doute. Je peux aussi en rajouter une petite louche pour parler du syndrome de l’imposteur. Ce sujet est parfois mis en scène par les auteurs, mais je crois que jusqu’ici je n’ai jamais vu ça aussi bien traité que par Parker. Du côté des personnages, on a aussi droit à un personnage agaçant, Daurenja, qui tape bien sur les nerfs de Vaatzes. Au point que je me demande parfois s’il n’est pas une sorte d’incarnation divine présente uniquement pour agacer Vaatzes.

Sur le plan thématique, Parker m’a donné un peu l’impression de traiter dans sa première trilogie de la folie, puis dans le deuxième de l’identité. Si je devais définir un thème récurrent pour cette troisième trilogie, ce serait peut-être l’orgueil. Sans pour autant que les deux précédents thèmes soient absents. Il y a aussi parfois ces petits moments où je me demande si le destin n’a pas décidé de jouer de l’absurdité. Ainsi, Vaatzes a été puni pour être sorti des clous, acte à l’origine de toute cette histoire. Pourtant, à un moment dans Evil for Evil, on le voit hésiter sur la marche à suivre et l’intérêt de poursuivre son plan destructeur. Et notre protagoniste de continuer son œuvre, par soucis de ne plus sortir d’un carcan.

Avec Evil for Evil, K. J. Parker continue de façon satisfaisante son Engineer Trilogy. Vaaztes continue de dérouler son plan. Le destin semble corriger quelques petits détails en coulisses. Je continue de m’interroger sur les motivations de la femme de Vaatzes et on aperçoit l’ombre d’au moins un autre marionnettiste. Parker réussit à semer quelques surprises et je me régale en lisant tout ça. Vivement le dernier volume, The Escapement.

Evil for Evil
de K. J. Parker
éditions Orbit
600 pages (format moyen)

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