Anges déchus, de Richard Morgan

A la relecture, le charme de Carbone modifié de Richard Morgan avait à nouveau opéré. Retrouver Takeshi Kovacs s’était fait sans aucun soucis. Il est donc logique que je poursuive dans cette voie et que je relise aussi Anges déchus, deuxième épisode des aventures de ce croisement de détective et de psychopathe.

Quelques décennies ont passé depuis Carbone modifié et Takeshi Kovacs se retrouve coincé au beau milieu d’une guerre qui dure depuis trop longtemps sur Sanction IV. Lassé des horreurs d’un conflit interminable où il ne se sent plus à sa place, il se laisse convaincre de déserter pour s’engager dans une expédition de xéno-archéologie avec pour objectif l’un des Saint-Graal du domaine : l’accès à un vaisseau martien.

Les retrouvailles avec Takeshi Kovacs se passent bien. Dès le début, on replonge dans cet univers cyberpunk dans lequel on peut recoller les morceaux des gens voire si nécessaire recharger leur personnalité dans un nouveau corps. Et Kovacs est égal à lui-même. Cynique, violent et capable de tout quand il estime que l’on dépasse ses limites.

L’ambiance est différente de Carbone modifié. On n’est plus dans un polar avec un privé engagé pour résoudre un mystère. Cette fois on part à la chasse au trésor et si ce dernier est d’ordre xéno-archéologique, cela reste une forme de trésor. Ce qui implique une possible concurrence, pour peu que plusieurs personnes disposent de la carte menant au trésor en question. Et une fois que l’on est parvenu à former son équipe, le doute subsiste toujours un peu lorsque l’on est dans une entreprise visant à gagner beaucoup d’argent en marge de la légalité : qui ne serait pas tenté de doubler ses petits camarades pour avoir une meilleure part du gâteau ? Rajoutons à cela un monde en guerre en guise de décor et l’on obtient un mélange qui peut se révéler explosif.

On a évidemment notre quota d’action, avec un Kovacs qui essaie de garder un coup d’avance sur ses adversaires et profite au possible de sa formation de Diplo… même si ce n’est parfois pas suffisant. Tout comme dans Carbone Modifié, l’auteur agrémente son récit de quelques réflexions. Le contexte d’Anges déchus amène naturellement des interrogations sur le conflit en cours, son origine, la nature des forces en présence et la réalité ou non des changements que la victoire de l’un  ou l’autre camp pourrait apporter. Notre narrateur garde son regard cynique sur ce genre de situation. Morgan égratigne aussi un peu le sujet de la recherche scientifique, ici xéno-archéologique, et particulièrement son aspect politique. Car le monde de la recherche est parfois bien éloigné de la sagesse et de la rationalité et les choix faits le sont parfois plus pour des raisons politiques que logiques. On voit d’ailleurs de quelle façon l’ingérence du politique dans le scientifique peut déséquilibrer totalement la balance.

Le thème de la xéno-archéologie est propice aux hypothèses les plus folles et on partagera la curiosité des protagonistes au sujet de ces fameux martiens qui auraient précédés l’humanité dans l’espace. Et l’on comprendra bien la tentation qui consiste à calquer nos schémas et raisonnements humains sur une espèce dont on sait en fin de compte bien peu de choses. Et combien il est donc facile de s’induire en erreur. De façon plus discrète on voit poindre à nouveau une idée déjà entraperçue dans le premier volume : dans une société où l’on peut changer de corps quasiment à volonté, comment être sûr de l’identité de son interlocuteur ?

Une fois tournée la dernière page d’Anges déchus, le constat est évident : ça fonctionne toujours aussi bien à la relecture. Si l’ambiance de ce deuxième volume est différente de celle de Carbone modifié, le personnage principal est toujours là et c’est le principal. Richard Morgan livre une nouvelle fois un bon divertissement augmenté de quelques réflexions intéressantes. Tout ça avec quelques surprises que l’auteur arrive à égrener jusqu’au bout. La relecture du troisième et dernier volume, Furies déchaînées, s’impose comme une évidence.

Anges déchusAnges déchus (Broken Angels)
de Richard Morgan
traduit par Cédric Perdereau
illustration de Didier Florentz/Christian McGrath
éditions Bragelonne/Milady
416 pages (grand format) 606 pages (poche)

disponible en numérique sur 7switch

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3 réflexions sur « Anges déchus, de Richard Morgan »

    1. Tu auras toujours le personnage principal, avec sa violence et son cynisme. On n’est moins dans le roman noir puisque le cadre est différent, c’est plus une chasse au trésor. 🙂

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