Je continue ma relecture du run de Ram V sur Detective Comics et de ce long arc qu’est Gotham Nocturne. Après le deuxième acte, on passe à une sorte de mouvement intercalaire, suivant une espèce de modèle musical. Un mouvement dans lequel Batman n’est pas très présent et où il est plus un objet à enjeu qu’un personnage.
Batman a été capturé par les Orgham et infecté par leurs soins, en attendant son exécution publique, afin de tuer une bonne fois pour toute sa légende. Cependant, tout le monde ne reste pas les bras croisés. Notamment Selina Kyle, alias Catwoman, bien décidée à ne pas laisser disparaître l’amour de sa vie sans réagir.
Cet interlude dure cinq numéros de Detective Comics, ce qui nous fait quand même pas loin de deux cents pages, puisque le contingent de planches par numéro est élevé : trente pour les numéros 1077 à 1080, et carrément quarante pour le numéro 1076, soit plus que certains annuals (souvent en trente-huit planches). Bref, y a de la matière.
Le récit principal est une histoire de casse, dirigé et narré par Catwoman. Elle nous explique l’objectif, les moyens dont elle dispose, les techniques pour bien réaliser un bon casse. On la voit recruter son équipe, avec évidemment des antagonistes, des choix qui semblent parfois improbables, etc. Puis le déroulement du casse en question, avec tous les acteurices qui interviennent, comme autant de petits rouages d’une mécanique complexe. Avec son lot de surprises des deux côtés, évidemment. J’ai trouvé que ça fonctionnait bien.
Batman a un aspect double dans ce volume. D’un côté, il est central et d’une grande importance, puisque tout tourne autour de l’idée de le sauver ou de le perdre. Mais de l’autre côté, il est totalement passif et réduit au statut d’objet, une cible de casse. En face, Selina / Catwoman est vraiment le moteur de cet interlude. On sent son implication totale, on ressent son besoin et sa nécessité de ne pas échouer. Sa capacité à recourir à des solutions de dernier recours, d’aller jusqu’au bout et de ne jamais baisser les bras tant qu’il reste une étincelle de vie. Une plaine mesure de sa volonté de ne pas laisser disparaître l’homme qui compte tant pour elle et pour d’autres.
On a aussi quelques petits aperçus d’une Gotham sous influence des Orgham, une ville en train de perdre son âme, où les puissants remodèlent la cité et sa société, en n’hésitant pas à faire disparaître des populations jugées indésirables.
Du côté graphique, c’est Jason Shawn Alexander qui est à la manœuvre pendant la majeure partie de cet interlude et j’ai bien aimé le résultat. C’est sombre et ça passe bien : Gotham n’est déjà pas très lumineuse en temps ordinaire, mais c’est encore pire sous la domination des Orgham.
Du côté des backup story, elles sont presque toutes écrites par un Dan Watters qui fait bien le job. On n’a cette fois pas de récit en plusieurs parties, tous ces petits récits sont d’un seul tenant. Mais ce sont tous clairement les pièces d’un ensemble plus vaste, mettant en scène les acteurices du casse en cours et de ses conséquences. De Montoya et ses questions à Eiko Hasigawa et sa déception amoureuse, en passant par la relation entre Cheshire et sa fille ou encore l’implication d’Azrael. Graphiquement, l’ensemble est plutôt plaisant.
Tout ça est servi sous de belles couvertures d’Evan Cagle qui continue d’offrir un travail qui fait plaisir à voir. On trouve aussi une compilation de couvrantes alternatives avec de belles choses à voir dans le lot.
J’ai beaucoup aimé ce volume. J’ai une affection particulière pour le personnage de Selina / Catwoman et je trouve qu’elle est bien mise en scène dans cet interlude. Ce dernier a un aspect un peu trompeur. Le nom de ce tome, comparé au reste, donne un peu l’impression d’une partie annexe de l’arc dans son ensemble. Pourtant, c’est là que converge de nombreux fils narratifs annexes développés dans les backup story des volumes précédents. Et c’est dans ce volume que se produit l’événement qui permet de tracer une frontière mort/résurrection capitale dans ce run. Bref, j’ai vraiment apprécié et je ne vais pas trainer pour relire le cinquième et dernier volume.

Batman – Detective Comics – volume 4 – Gotham Nocturne : Intermezzo : Batman, Outlaw
écrit par Ram V, Dan Watters
dessiné par Jason Shawn Alexander, Liam Sharp, Mike Perkins, Christopher Mitten, Ram ., Caspar Wijngaard, Juan Ferreyra
colorisé par Dave Stewart, Triona Farrell
lettré par Ariana Maher, Tom Napolitano, Steve Wands, Aditya Bidikar
éditions DC Comics (anglais) Urban Comics (français)
197 pages (anglais) 192 pages (français)