Jouer la guerre, d’Antoine Bourguilleau

Si je lis régulièrement des ouvrages d’histoire militaire, je suis aussi assez intéressé par le sujet du wargame, que je pratique un peu sur ordinateur. La sortie d’un livre consacré à l’histoire de ce loisir ne pouvait qu’attirer mon attention et j’ai fini par le lire.

Si le wargame a de nos jours largement diffusé dans le domaine ludique, c’est à l’origine un outil militaire et c’est ce que montre Bourguilleau dès le début de son ouvrage. L’auteur présente bien les précurseurs sur le sujet puis les premiers créateurs, à la fin du 18e siècle, de ce que l’on nomme d’abord Kriegspiele (jeu de guerre en allemand, soit la même chose que Wargame en anglais) puisque les initiateurs de cette activité sont outre-Rhin. On voit ensemble comment cette activité nouvelle se répand, parfois avec difficulté, dans les différentes armées. Les succès de certaines armées, notamment l’armée prussienne dans le seconde moitié du 19e siècle, contribuent à la propagation du kriegspiele, qui petit à petit devient le wargame. Le 20e siècle sera celui au cours duquel cette activité sort de la sphère militaire et entre dans la sphère ludique, pour revenir par la suite dans son milieu d’origine.

Si le plan de l’ouvrage est essentiellement chronologique, l’auteur profite néanmoins de chaque étape de cette histoire pour aborder certaines sujets connexes. Comme celui du simulationnisme, problème bien connu des rôlistes : pour avoir une parfaite représentation de la réalité, il faut un empilage infini de règles et de paramètres, ce qui nuit considérablement à la fluidité de l’activité. Ce phénomène provoque la formation de plusieurs façons d’aborder le wargame. Faut-il le simplifier ? Le complexifier ? Et plus largement a-t-il vocation à représenter la réalité ? Bref, il peut constituer un outil mais encore faut-il en trouver les usages et en comprendre les limites.

L’un des passages que j’ai beaucoup apprécié concerne différents exercices de simulation historiquement fait par diverses armées, en prévision de certains conflits, et où les résultats de ces simulations n’ont pas été intégrés, possiblement car ne correspondant pas aux attentes des armées les ayant réalisés… et prédisant pourtant correctement les résultats du conflit qui suit. Si l’on doit bien se garder de considérer le wargame comme un outil prédictif, on voit là qu’il peut pourtant apporter certaines leçons… pour peu qu’on sache les accepter.

L’ouvrage n’est pas très long et l’auteur a une plume qui se lit facilement, alors que le sujet est parfois un tout petit peu technique. J’ai beaucoup apprécié que l’on nous propose quelques extraits de règles des premiers kriegespiele, qui permettent entre autres de bien mesurer que la dimension ludique (et donc ergonomique) en étant totalement absente à l’origine. On a aussi droit à quelques photos qui montrent bien à quoi peut ressembler l’activité et offrent parfois des visions un peu amusante (par exemple, des gens très sérieux à quatre pattes en train de mesurer le sol avec des règles). Bref, ce fut une bonne lecture pour moi et celleux qui souhaiteraient découvrir le sujet peuvent s’y plonger sans hésitation.

Jouer la guerre – Histoire du wargame
d’Antoine Bourguilleau
éditions Passés Composés
264 pages (format moyen)

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