Coup de grâce, de Michael Dobbs

Ce qu’il y a de bien avec les trilogies, c’est qu’on n’a pas besoin d’attendre dix volumes pour connaître la fin de l’histoire. Coup de grâce est donc le dernier roman que Michael Dobbs a consacré à Francis Urquhart, concluant ainsi une trilogie démarrée avec House of Cards. Voyons un peu comment le premier ministre affronte de nouveaux problèmes.

Francis Urquhart a réussi à éviter les écueils de début de règne en tant que premier ministre, tant et si bien qu’il n’est maintenant plus qu’à quelque mois du record de longévité de Margaret Thatcher. Mais ses ennemis sont plus nombreux que jamais et son âge est l’un des nombreux prétextes pour l’attaquer. Urquhart va-t-il se maintenir ou au contraire finir éliminé par les siens ? Et va-t-il réussir à laisser sa marque dans l’histoire ?

Échec au roi commençait peu après House of Cards. Cette fois on a fait un saut dans le temps puisque Francis Urquhart est en poste depuis près de dix ans. Il a imposé sa marque, écrasé presque tout ce qui s’était dressé sur sa route et renouvelé progressivement son cabinet au fur et à mesure qu’il élaguait les plus mauvaises branches. Mais l’usure a aussi touché le premier ministre et on retrouve un Urquhart qui doute parfois de ses capacités et se sent vieillir. Le politique est toujours capable d’écraser ou de faire plier la plupart de ses interlocuteurs, mais on voit bien qu’il n’est plus tout à fait le même.

Dobbs prend bien évidemment son inspiration dans la réalité mais aussi dans la littérature britannique et si l’on sentait déjà une petite touche de Shakespeare dans les volumes précédents, elle est encore plus visible avec des références directes à César, tant le personnage historique que la pièce de théâtre. L’écriture est toujours aussi agréable à lire, avec quelques répliques qui frappent bien et les chapitres continuent d’avoir en épigraphe des petites citations d’Urquhart, jamais tendre lorsqu’il donne sa vision du monde et de la politique en particulier.

Dobbs élargit aussi un peu le cadre de son récit puisque l’on sort du Royaume-Uni et que l’on va se promener un peu du côté de Chypre. Et si l’on connait assez bien le problème de cette île coupée entre deux états, l’un grec et l’autre turc, on n’en saisit généralement pas très bien la complexité. Coup de grâce est donc aussi l’occasion de plonger un peu plus dans ce cadre et de rappeler que l’île a aussi connu une colonisation britannique dont il reste quelques vestiges avec la présence de deux bases militaires qui sont autant de territoires souverains britanniques sur une île partagée entre deux états. Bref, un bon cadre pour créer des soucis, ce que Dobbs ne se prive pas de faire.

Avec Coup de grâce, Michael Dobbs propose une fin en apothéose pour sa série Francis Urquhart. A travers les trois volumes, l’auteur nous aura proposé trois étapes de la vie d’un homme politique. Avec un certain didactisme, utile pour ceux qui ne maîtrisent pas toute la complexité de la direction politique du pays. Toujours avec le cynisme propre au personnage principal et qui permet à l’auteur d’égratigner certaines institutions et certaines pratiques. Le tout servi par une plume agréable à lire et qui reflète la culture de son auteur. Bref, une trilogie que j’ai apprécié et que je recommande sans hésitation aux amateurs d’intrigues politiques.

Coup de grâceCoup de grâce (The Final Cut)
de Michael Dobbs
traduit par Frédéric Le Berre
éditions Bragelonne
480 pages (grand format)

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3 réflexions sur « Coup de grâce, de Michael Dobbs »

  1. Un rapport avec la série Netflix ?
    Car si c’est le cas, je ne vais peut-être pas lire, mais du coup regarder la série, et ensuite cela me tentera alors.

    Merci

    1. Il y a effectivement un rapport.
      Les trois romans de Michael Dobbs ont d’abord été adapté dans les années 1990 par la télévision britannique en trois petites séries de quatre épisodes chacune. Et ça a ensuite été adapté par la télévision américaine depuis quelques années.
      Mais le rapport entre les deux me semble aller en diminuant, en tout cas au vu des deux premières saisons de la série télé. Si la première saison reprend grosso-modo l’intrigue du premier roman, en l’adaptant au paysage politique américain, la deuxième saison s’éloigne déjà un peu plus du deuxième bouquin. La série américaine est sympa, mais les romans me semblent un cran légèrement au dessus. Notamment par la plume de Dobbs lui-même qui écrit plutôt bien (et la traduction le rend assez bien) avec une certaine culture classique (Shakespeare, etc).

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