Les énigmes de l’histoire du monde, dirigé par Jean-Christian Petitfils

J’ai parlé ici il y a quelques temps d’une anthologie rassemblant des essais sur diverses énigmes de l’histoire de France. Le concept ayant visiblement bien fonctionné, l’éditeur et l’anthologiste ont proposé un nouveau volume s’intéressant cette fois aux énigmes de l’histoire du reste du monde.

On retrouve la même formule que dans le premier volume : une vingtaine de mystères sont décortiqués un à un, avec des propositions d’explications pour certains ou au moins une réfutation de certaines hypothèses populaires lorsque les historiens ne disposent pas d’éléments permettant d’établir une explication claire. Une nouvelle fois, des biographies sont proposées sur chaque sujet pour celleux qui souhaiteraient creuser telle ou telle question.

Les sujets sont assez variés : l’identité de Shakespeare, la mort de Louis II de Bavière, le devenir du tsar Alexandre, etc. Et évidemment, ces incontournables des légendes historiques que sont l’Atlantide, le suaire de Turin et l’assassinat de Kennedy.

Je connaissais un peu moins les sujets abordés que dans le volume sur l’histoire de France, ce fut donc l’occasion pour de découvrir quelques énigmes dont j’ignorais tout. J’y ai trouvé du bon et du moins bon, avec deux exemples que je propose ci-dessous.

Du côté pas très bon, l’article sur le suaire de Turin. L’auteur a clairement tranché en faveur de l’hypothèse d’un suaire datant du début de notre ère. Le problème, pour moi, est qu’il expose les résultats des datations au carbone 14, toutes indiquant un objet réalisé au Moyen-Âge, et les balancent ensuite à la poubelle parce qu’elles ne cadrent pas avec l’hypothèse qu’il veut défendre. La suite est dans la continuité : les autres éléments permettant une possible datation, comme la présence de pollens ou la matière du tissu, sont interprétés exclusivement comme prouvant l’explication souhaitée. Le fait qu’on utilisait telle type de textile à Jérusalem à l’époque ne prouve rien si on ne montre pas aussi que ce même textile n’était pas utilisé en Europe au Moyen-Âge. Idem pour les pollens (indiquant au mieux une géographie mais clairement pas une temporalité). Bref, la démonstration est complètement foireuse et de mauvaise foi.

A l’opposé, l’essai sur l’Atlantide choisit la rationalité en confrontant le récit de Platon aux connaissances du terrain et de son histoire. Les hypothèses, parfois très loufoques, des partisans d’une réalité de l’Atlantide sont balayées les unes après les autres… Enfin pour les plus communes. Il y a une telle variété sur le sujet qu’un volume complet ne suffirait pas à toutes les lister. Et surtout, on revient au texte de Platon, seule et unique source à la base du mythe, en faisant ce que tout historien doit faire d’une source : la critiquer, la contextualiser. Se demander à qui parle l’auteur lorsqu’il évoque cette étrange Atlantide. Alors apparait l’explication d’une allégorie, permettant de critiquer le présent dans lequel vivait Platon. Ce qui semble en fin de compte beaucoup plus crédible que toutes les idées reposant sur la transmission pendant des milliers d’années d’un récit cataclysmique dont nous n’aurions pour seul écho que les écrits du célèbre philosophe grec.

Bref, je trouve que le niveau des essais est (très) variable. Mais s’il y a quelques trucs vraiment regrettables, comme cette histoire de suaire, dans l’ensemble c’est plutôt pas mal et ça permet de découvrir quelques mystères pas forcément très connu par chez nous.

Les énigmes de l’histoire du monde
ouvrage dirigé par Jean-Christian Petitfils
éditions Perrin
380 pages, dont notes et bibliographie (poche)

Disponible en numérique chez 7switch

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